De nombreuses études portent sur les taux de prévalence des troubles de santé mentale dans la population autiste, avec des résultats de 10 % à 80 %. Cette large fourchette de résultats s’explique probablement par les différences entre les populations étudiées, par la taille l’échantillonnage et par les écarts marqués que présente la population autiste en ce qui concerne les habiletés cognitives, ainsi que par la façon dont les problèmes de santé mentale sont définis et mesurés. Globalement, plusieurs études concordent pour conclure que 40 % à 70 % des membres de cette population connaîtront au cours de leur vie des difficultés de santé mentale significatives à l’échelle clinique.
L’identification de troubles psychiatriques peut être ardue chez les personnes autistes, qui peuvent aussi avoir des limitations intellectuelles ou de communication, car il est souvent nécessaire de répondre à des questionnaires écrits ou à des questions orales en clinique à propos de leurs états émotionnels internes et de leurs expériences. Par exemple, de nombreux tests de dépistage de la dépression comportent des questions à propos du manque d’énergie, de l’appétit, du sommeil, des problèmes de concentration ou des pensées suicidaires. Certaines personnes autistes peuvent ne pas être en mesure d’évaluer leurs propres schémas de pensée ou d’identifier leur état émotionnel, qu’il s’agisse de dépression ou d’anxiété. Une autre difficulté réside dans l’établissement d’un lien entre les symptômes actuels et une période de temps définie (p. ex. : « Au cours des deux dernières semaines, à quelle fréquence avez-vous été affecté par les problèmes suivants? »)
De plus, de nombreuses personnes autistes ont plus d’un trouble psychiatrique, accompagnés de divers symptômes qui peuvent masquer, voire aggraver un autre trouble. Par exemple, une personne qui a un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH) pourrait être décrite comme étant « agitée », mais ceci peut aussi être un symptôme de dépression. Parfois, les comportements inhabituels des personnes qui ont reçu un diagnostic de TSA sont systématiquement attribués à ce trouble (« Il fait ça parce qu’il est autiste »), alors que le symptôme ou le comportement observé pourrait découler d’un problème émergent de santé physique ou mentale.
Une étude de 2008 portant sur 112 enfants autistes de 10 à 14 ans a conclu que 70 % des participants à l’étude présentaient au moins un trouble psychiatrique cooccurrent et que 41 % en présentaient deux ou plus (Simonoff et al. 2008).
Une autre étude réalisée au Royaume-Uni a conclu que les personnes autistes étaient six fois plus à risque de présenter des problèmes émotionnels ou comportementaux significatifs à l’échelle clinique que les personnes non autistes (Totsika, Hastings, Emerson, Lancaster et Berridge, 2011).
Comme une partie des symptômes et comportements associés à l’autisme peuvent ressembler à ceux de troubles en santé mentale, l’obtention d’un diagnostic pertinent peut être difficile, surtout en raison du faible nombre de professionnels en santé mentale qui connaissent bien l’autisme. De plus, le diagnostic de TSA peut masquer les difficultés de santé mentale (Weiss 2016). Par exemple, si une personne autiste a de la difficulté à parler en classe ou à participer à des activités de groupe, ce « comportement » (incapacité de parler ou de participer) peut être attribué à son diagnostic de TSA (« C’est parce qu’elle est autiste qu’elle a ce ‘comportement’ »). Mais en fait, cette personne pourrait très bien présenter un trouble anxieux cooccurrent ou sous-jacent qui cause ses difficultés à parler ou à participer. L’attribution erronée de tous les comportements à la grande famille des « comportements autistes » peut occasionner des erreurs de diagnostic en santé mentale et, par conséquent, des lacunes thérapeutiques.
Dr Jonathan Weiss, titulaire de la chaire Autism Spectrum Disorders Treatment and Care Research à York University, a récemment présenté un webinaire portant sur les difficultés d’évaluation et de diagnostic en santé mentale pour les jeunes présentant un trouble du développement, y compris les jeunes autistes, intitulée « Mental Health Problems in Youth with Developmental Disabilities: Foundations of Assessment and Intervention ».
Dr Weiss (2016) souligne plusieurs points importants au cours de cette conférence, y compris les taux de prévalence de difficultés en santé mentale proportionnellement plus élevés chez les personnes autistes.
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